Hier, j’avais à cœur de passer la souffleuse dans l’entrée avant la vague de froid de cette semaine. Et pour la passer, je devais d’abord changer l’huile. Pour changer l’huile, il me faut d’abord trouver par où ça sort. Après un peu de gossage, je finis par identifier une sorte de long boulon que je dois retirer. Je me procure un outil et je dévisse le boulon.
Pour dévisser le boulon, il est préférable d’avoir un contenant pour recueillir l’huile usée. Pour avoir un contenant, il est préférable d’y penser AVANT de retirer complètement le boulon. Pour remettre l’hostie de boulon en place quand ça pisse l’huile gros comme un crayon feutre, il faut avoir de bons réflexes. Pour avoir de bons réflexes, je suggère de s’assurer d’abord de ne pas avoir de foutue d’huile sur les doigts après qu’elle ait pissé partout et qu’il te fallait l’endiguer avant que le Niagara se trouve un nouveau confluent, en l’occurrence le plancher de ta remise.
Sinon, et dans l’ordre, tu attrapes le guidon de la souffleuse de la main droite (celle qui tient déjà la clé à molette dégoulinante d’huile), tu lèves la souffleuse dans l’espoir que la gravité va cesser son influence sur la crue des huiles. De ta main gauche (la mauvaise) tu essaies naïvement et dans la pénombre, de remettre le boulon dans le trou noyé d’huile, invisible dans la position que tu as adopté. Le guidon te glisse des mains, la clé à molette tombe, ton sixième sens évalue en 1/4 de seconde qu’il est plus important de rattraper la clé de 10 grammes que le guidon d’une souffleuse de 350 livres. Tes réflexes félins te font frapper la clé avec ta main au lieu de l’attraper, de façon à ce qu’elle aille scratcher la peinture de la souffleuse, ce qu’elle n’aurait pas fait si tu lui avais sacré patience.
Le guidon de la souffleuse, qui n’a pas que ça à faire, se sent subitement une attirance vers le bas, attirance dictée par le poids non négligeable de l’engin. Entre temps, tu as pris soin de te mettre la tête exactement sur sa trajectoire en tentant de voir où est partie la foutue clé à molette. Le guidon imprime profondément dans ton crâne, la marque de commerce de l’engin et la forme du guidon. Tu perds l’équilibre. Heureusement que tu étais accroupis, ça ne fait pas loin pour tomber. Tout juste sur la flaque d’huile que tu essayais d’éviter d’agrandir.
La souffleuse étant revenue dans sa position de départ et le boulon n’étant toujours pas remis en place, le reste de l’huile makes a run for it. Tu le sais parce que là où elle coule sur ta jambe de pantalon neuf, tu ressens la même sensation que celle qui t’imprègne le fond de culotte. Cette même culotte que tu aurais dû enlever en revenant du travail pour mettre des jeans, mais que tu as gardé parce qu’après tout, c’est quoi les chances qu’un gars se salisse juste en partant sa souffleuse?